Gérard Cabiron,

L’art et la matière.

Gérard Cabiron, l’art et la matière

C’est un peu le traiteur du bonheur. Depuis 25 ans, Gérard Cabiron est un compagnon incontournable des unions du grand Montpellier. « J’ai marié plus de 4000 familles ! C’est fabuleux d’avoir côtoyé tout ce bonheur… » Un destin extraordinaire, qui prend racine dans l’atelier de son père Gabriel, boucher. Très jeune, ce Montpelliérain de naissance, mais aveyronnais de cœur, s’initie aux métiers de bouche auprès des ouvriers de papa. Le déclic se produira au collège. « Lors des cours de pâtisserie, j’ai compris que j’étais fait pour un métier manuel et gourmand ! »

Le sucré, le plaisir immédiat

Il suit la voie royale des futurs grands : lycée hôtelier La Colline à Montpellier, Bac pro à Nîmes… Puis, après un passage dans une petite pâtisserie du Pila-Saint-Gély, il se spécialise dans l’exigeante école Ferrandi, à Paris. « Le sucré me plaisait plus que le salé. C’est associé à la gourmandise, au plaisir immédiat. » Son parcours se poursuit chez des étoilés, comme la Maison Lameloise (3 étoiles, Bourgogne). Il fera même un détour auprès de la famille Andrieu et leur Atelier des chocolats de Bayonne…

Un choix qui résonne comme une évidence pour cet homme méthodique et rigoureux. «Dans les desserts, on ne doit pas se tromper. Tout doit être pensé, les recettes sont très précises. Il n’y a pas de place pour l’improvisation. »

En 1994, c’est le grand retour à Montpellier. «Je voulais travailler avec mon frère Michel, qui avait une activité de restauration événementielle. » Ensemble, ils développent Cabiron traiteur, dont la finesse des plats et la magie des desserts est de plus en plus reconnue.

Mof, un label prestigieux

Au début des années 2000, l’homme se lance un défi : le concours des Mof, Meilleurs ouvriers de France. « Cela représente deux ans de pâtisserie non-stop. Un concours de 3 jours, c’est beaucoup de stress. Mieux valait l’obtenir, vu ce que l’on fait subir à son entourage pour s’y préparer ! » En 2007, Gérard Cabiron obtient la tunique tricolore : le voilà « Mof sucre option glacier ». « Le titre Mof, c’est une reconnaissance nationale de ses pairs. Le titre permet de voyager, de faire de nouvelles rencontres… » 

Fort de ce label prestigieux, il va ouvrir une boutique de douceurs à Odysseum, en 2009. « C’est là que le nom Cabiron s’est fait connaître du grand public. »

Glaces et macarons

Alors que Pierre Hermé a relancé la mode des macarons, Gérard Cabiron se prend de passion pour la mignardise. Il prendra «deux ans » pour mettre au point sa recette. « J’ai fait des centaines d’essais, au degré près, à la minute près, au gramme près… C’est un produit fabuleux, le macaron. On ne dirait pas, mais il est bourré de technologie. On doit associer de multiples facteurs pour le réussir : des conditions de travail très précises, une gestion parfaite de la matière première. » Cerise sur le gâteau : le macaron est sans gluten, et c’est un vrai caméléon. «On peut décliner toutes les saveurs et les parfums de la pâtisserie dans une petite bouchée ! » Son catalogue compte plus de 30 saveurs !

Une diversité qu’il applique également au menu de ses glaces. Son autre pêché mignon. « J’adore cela ! On peut en manger toute l’année. Dans un restaurant, c’est devenu un complément indispensable de tout dessert. La palette de parfums est inépuisable. J’adore tester les goûts, les idées. On peut toujours aller chercher une nouveauté. »

Une nouvelle vie

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, l’homme assure que « préparer un macaron ou une glace, ce n’est pas si difficile, à partir du moment où l’on connaît les gestes et les ingrédients ». Justement, Gérard Cabiron a très envie de transmettre. À tel point qu’il annonce un changement de cap à l’aube de ses 50 ans : le fameux traiteur tire sa révérence ! « Je me lance dans une nouvelle aventure », confie-t-il dans un petit sourire. « J’avais envie de rencontrer les gens, de sortir du laboratoire. » Après avoir assuré des masterclass en école hôtelière ou auprès de professionnels, il a envie de se tourner vers le grand public. Pour prolonger l’expérience de son bistrot Chez nous, au Millénaire, et du comptoir Chez vous, aux halles Laissac. Fini, les mariages : place désormais à des « moments de simplicité, d’échange et de rencontre ».

La rencontre avec Les Terroirologues tombe ainsi à point nommé. Dès septembre, Gérard Cabiron va accueillir ses premiers ateliers dans sa brasserie Chez nous. « Recevoir des gourmands pendant une mâtinée, c’est vivre un moment de convivialité. Les gens seront là pour se faire plaisir. » En deux heures, il pourra dévoiler sa science des macarons (et bientôt des glaces). « On va le faire ensemble, je suivrai les personnes pour qu’elles y arrivent. Ce ne sera peut-être pas parfait la première fois… Mais chacun repartira avec la recette pour s’exercer, et connaîtra les écueils à éviter. »

Une expérience accessible en exclusivité pour de petits groupes. « Chacun aura ses pesées et travaillera avec sa petite gamelle.» Le tout, dans la salle du restaurant, aménagée pour l’occasion. « Je ne voulais pas faire cela dans une cuisine professionnelle, trop froide. Il faut retrouver l’esprit de la maison, des ustensiles que tout le monde peut avoir : une plaque, un four, un batteur… »

Une école Cabiron ?

Le chef n’a même pas peur de livrer ses secrets ! « C’est fini, le temps des recettes secrètes ! Avec internet, on trouve tout facilement. Mais le savoir-faire, la technique, cela ne s’improvise pas. Si on ne le voit pas, on ne peut pas y arriver. » Le chef est un peu impatient de vivre ses premiers ateliers. « Partager mes recettes, c’est stimulant, cela m’apportera de nouvelles expériences, de nouvelles idées. J’ai envie de voir la réaction des gens, leurs idées. » Il imagine déjà multiplier les ateliers, s’ouvrir aux entreprises… Avant de créer un jour, qui sait, sa propre école : «Un lieu comme à la maison, avec des cuisines classiques… » Une démarche à son image : simplicité, chaleur et générosité. «On n’est pas là pour se prendre la tête, mais pour partager. La gourmandise est un plaisir universel. » Ça donne envie, non ?

Gwenaël Cadoret